[Communiqué de presse] « Tchernobyl, Fukushima : le déni de l’accident »

Par Le secrétariat – 9 avril 2019

L’accident nucléaire de Fukushima a eu lieu il y a huit ans maintenant, le 11 mars 2011. 
Celui de Tchernobyl, il y a bientôt 33 ans : le 26 avril 1986.  Quelles traces en reste-t-il, des années après ? Le désastre nucléaire perdure. La contamination radioactive restera présente dans les sols pour des siècles, les impacts sanitaires s’accumulent et les situations post-accidentelles ne sont toujours pas maîtrisées.

J’ai eu le plaisir aujourd’hui d’accueillir le Pr Tetsuji Imanaka, Chercheur de génie nucléaire à l’Institut de recherches sur réacteur nucléaire à l’Université de Kyoto.
Dès le départ, ses recherches ont consisté à vérifier et à démontrer comment la radioactivité dans l’exploitation du nucléaire est dangereuse pour les humains. C’est un des scientifiques d’opposition du «collectif des six scientifiques de Kumadori»  au sein de cet institut.
Par son expérience à travers ses études sur les conséquences des radiations de Hiroshima-Nagasaki jusqu’à Tchernobyl et Fukushima , en passant par Semipalatinsk, il est un des experts les plus pertinents sur les effets radioactifs des accidents nucléaires

Les conséquences de Tchernobyl et Fukushima continuent de se faire sentir jour après jour pour des millions de gens. À Tchernobyl, environ 5 millions de personnes environ vivent encore dans des zones contaminées. Les survivants, dont plusieurs centaines de milliers ont été contraints d’abandonner leur logement pour s’établir plus loin, continuent par exemple de manger de la nourriture contaminée dans des proportions largement supérieures aux normes en vigueur.
Au Japon, ce sont près de 100 000 personnes qui n’ont toujours pas pu rejoindre leur maison – et une bonne partie d’entre elles ne le pourra sans doute jamais, malgré la rhétorique illusoire du gouvernement japonais qui continue de minimiser le problème.

Mais le plus inquiétant, c’est le déni de l’accident nucléaire. Qu’il s’agisse du gouvernement japonais ou les gouvernements propres aux pays contaminés par Tchernobyl, c’est comme s’il y avait un déni de l’accident nucléaire.  Les programmes de surveillance alimentaire autour de Tchernobyl ont ainsi été largement réduits. Quant au gouvernement japonais, tous les efforts sont faits pour nettoyer les terres et les esprits avant l’accueil des jeux olympiques de Tokyo en 2020, permettant de donner l’élan nécessaire à l’oubli.  Il a invité les habitants à retourner “ chez eux ” dès 2017, alors même que le territoire de Fukushima est encore bien loin d’être décontaminé.

Les accidents nucléaires sont avant tout un enjeu de santé publique. On observe des impacts graves sur la santé des individus appartenant aux communautés concernées par les accidents de Tchernobyl et Fukushima. Au sein des zones contaminées, le taux de mortalité est en effet nettement supérieur à la normale, le taux de natalité est quant à lui inférieur. La prévalence du cancer et des maladies mentales en forte hausse. A Fukushima, une expansion du cancer de la thyroïde sévit parmi les enfants. Plus de 200 cancers de la thyroïde ont déjà été diagnostiqués chez des enfants et adolescents, alors que cette pathologie est rarissime chez eux. Et un tiers environ des mères vivant à proximité ou dans les zones contaminées montrent des symptômes de dépression.

Les leçons en terme de sûreté n’ont pas été tirées. Il y a eu un manque de préparation, mais aussi de réactivité. Le village d’Iitaté n’a été évacué due le 22 avril 2011, alors qu’il a été fortement touché et des tablettes d’Iodes n’ont pas été distribuées. Que ce soit au Japon comme en France, les autorités n’ont pas suffisamment pris en considération le retour d’expérience de ces tragédies, qui aurait dû amener à fermer bon nombre d’installations immédiatement. En France, les centrales nucléaires de Fessenheim, Bugey, Gravelines, Tricastin et Blayais sont une menace immédiate du simple fait de leur vétusté. Mais aussi d’inondations potentielles ou de risques sismiques.

Le nucléaire est un désastre à long terme.  Les conséquences du nucléaire sont dramatiques pour des millions de personnes. Les leçons de Tchernobyl et Fukushima, nous rappellent surtout: non, le nucléaire n’est pas une énergie sûre. Aucun pays, même la France ne peut gérer un accident nucléaire.  Comme l’a rappelé l’ancien Premier Ministre japonais Naoto Kan lors de sa dernière visite Au Parlement européen en 2018, le seul moyen fiable d’éviter un accident est la sortie du nucléaire ! Puissent L’Union européenne et les États membres entendre leur homologue nippon.

Michèle RIVASI
Députée européenne EELV,
co-fondatrice de la Criirad