Une découverte étonnante sur les pics de radioactivité à Fukushima

PAR ARNAUD LE GALL

ACTUALITÉDans le laboratoire IRSN de Cherbourg (Manche), les chercheurs ont révélé le rôle des bactéries dans la diffusion de la radioactivité. Une découverte qui va permettre de prévenir les variations de pollution à Fukushima.

Incités par l’arrêt des subventions qui leur étaient allouées, les habitants des zones évacuées de Fukushima reviennent peu à peu dans leurs anciens lieux de vie, au milieu des sacs de terre contaminée qui s’entassent à perte de vue.PUBLICITÉ

Huit ans après l’accident nucléaire, le Japon a mené un chantier colossal de décontamination des villes et villages, mais les espaces boisés demeurent des zones à éviter. Ils constituent une réserve de radioactivité, qui libère ses radioéléments toxiques par pics, à la manière des particules fines générées par les voitures. Selon la météo, la population se retrouve plus ou moins exposée. 

La terre contaminée a été entreposée dans des sacs. (Photo : Gilles Laurent / archives Ouest-France)

Les bactéries, vecteurs de radioactivité

À 10 000 km des réacteurs accidentés de Daiichi, dans la Manche, des chercheurs de Cherbourg sont parvenus à expliquer ces variations de la radioactivité. Perché sur les hauteurs de la ville, le laboratoire de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est spécialisé dans les recherches autour des transferts de radioactivité en milieu marin et dans

« Nous savions déjà que tout ce qui est végétation pose problème, car il y a un phénomène de remise en suspension des particules. Elles reviennent dans l’atmosphère avec le vent, introduit Denis Maro, à la tête de l’équipe d’une quinzaine de scientifiques. Ce qui était aussi connu, c’est que les micro-organismes comme les champignons ou les bactéries accumulent la radioactivité. »

Denis Maro devait partir au Japon pour monter un partenariat avec l’université de Tsukuba. (Photo : Ouest-France)

Les travaux du laboratoire ont mis en lumière un élément nouveau : le rôle des bactéries dans la diffusion de la pollution. « Nous avons démontré qu’elles s’organisaient, qu’elles se groupaient. Ainsi, elles ont une prise au vent plus importante et une facilité de remise en suspension bien plus importante qu’une poussière inerte », révèle le chercheur.

Un outil de prévision

Cette découverte a fait l’objet d’une première thèse, vite repérée par les Japonais lors de congrès scientifiques. Un rapprochement s’est fait avec l’université de Tsukuba, au nord de Tokyo. « Nous allons monter un projet commun, pour créer un outil de prévision »,indique Denis Maro, qui devait s’envoler pour le Japon. 

L’idée, est de croiser les données sur les bactéries, avec les mesures météos. « Ainsi, nous pourrons prévoir les épisodes de remise en suspension ce qui permettra de rassurer la population ou de prendre telle ou telle mesure », prévoit le directeur du laboratoire normand. 

L’attente est forte. Lors des pics qui durent entre quelques jours et une semaine, la radioactivité mesurée peut être 100 à 1 000 fois plus importante qu’une journée normale.