"Rien n'est plus proche du Vrai ... que le Faux"

Catégorie : Japon 2019

Fukushima : cinq ans de prison

Fukushima : cinq ans de prison requis pour les ex-dirigeants de Tepco

Les anciens exploitants de la centrale nucléaire japonaise sont poursuivis pour « négligence ayant entraîné la mort ».

Par Philippe Mesmer Publié aujourd’hui à 11h59

Un homme manifeste devant le tribunal de district de Tokyo, lors du premier procès de trois anciens cadres de Tepco, le 30 juin 2017.
Un homme manifeste devant le tribunal de district de Tokyo, lors du premier procès de trois anciens cadres de Tepco, le 30 juin 2017. TORU YAMANAKA / AFP

Cinq ans de détention, le maximum prévu par la loi. Telle a été la peine requise, mercredi 26 décembre, contre Tsunehisa Katsumata, le président, de 2002 à 2012, de la Compagnie d’électricité de Tokyo (Tepco), et ses deux vice-présidents, Ichiro Takekuro et Sakae Muto, pour leur responsabilité dans la catastrophe nucléaire de Fukushima, provoquée par le séisme et le tsunami de mars 2011. Aujourd’hui retraités qui se voudraient paisibles, les trois hommes sont jugés pour « négligence ayant entraîné la mort ».

Plus précisément, ils sont critiqués pour leur gestion contestée de l’activité nucléaire de Tepco, à l’origine de la catastrophe et de ses conséquences, notamment la mort de quarante-quatre personnes dans l’évacuation chaotique d’un hôpital au moment du drame. Pour le parquet, les trois ex-dirigeants n’ont pas suffisamment pris en compte le risque de tsunami. Les procureurs leur reprochent d’avoir eu en leur possession des données mentionnant le risque de vagues dépassant les 15 mètres de haut, pouvant provoquer une panne de courant. « Ils auraient dû suspendre l’activité de la centrale nucléaire » jusqu’à la mise en place de mesures de prévention, a estimé le parquet.Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Au coeur du chantier titanesque du démantèlement de Fukushima

Pour important qu’il soit pour les victimes et pour l’avenir du nucléaire japonais, ce procès au pénal a failli ne jamais avoir lieu. Le parquet avait dans un premier temps rejeté la plainte déposée, estimant que Tepco comme le gouvernement ne pouvaient prévoir l’ampleur du séisme et du tsunami. Le recours au système des commissions d’étude des décisions du parquet a permis d’inverser la décision en 2015. Jusque-là, la trentaine d’actions intentées en relation avec la pire catastrophe nucléaire depuis Tchernobyl l’a été au civil.

« Depuis l’accident, personne n’a été reconnu responsable, et les causes n’ont pas été données », regrettait, au début des audiences, en juin 2017, Ruiko Muto, présidente de l’association de victimes ayant milité pour le procès. Dans son témoignage, en octobre 2018, M. Katsumata, à l’allure hiératique sous son élégante chevelure blanche, a rejeté toute responsabilité, invoquant l’impossibilité pour un président de tout savoir de ce qui se passe dans son entreprise. « Les contacts avec le personnel étaient réduits. »

MM. Takekuro et Muto ont insisté sur l’imprévisibilité de l’ampleur de la catastrophe et argué d’un manque de fiabilité des études sur les risques de tsunami. Ils ont également nié avoir approuvé un projet de renforcement des protections de la centrale contre les raz-de-marée, jamais concrétisé. Selon certains témoignages, ils l’auraient fait lors d’une réunion de février 2008. A cette occasion, Kazuhiko Yamashita, responsable des mesures antisismiques, les avait alertés sur un risque de tsunami à 7,7 mètres, à la centrale de Fukushima, où les protections ne prévoyaient qu’une vague de 3 mètres.

Par la suite, s’appuyant sur une étude gouvernementale de 2002, le risque d’une vague de 15,7 mètres avait été évoqué au sein de la direction de Tepco. M. Muto, alors directeur adjoint de la division de l’énergie nucléaire, aurait, selon plusieurs témoins, demandé d’enterrer ces rapports.

Procès peu médiatisé au Japon

La défense des trois hommes a également été mise à mal par le témoignage d’un ancien employé de Japan Atomic Power – autre compagnie d’électricité. D’après lui, sa société a pris au sérieux l’étude de 2002 et a construit des digues permettant à sa centrale Tokai 2 du département d’Ibaraki, au sud de Fukushima, de résister à un tsunami de 12,2 mètres. Elle n’a subi que peu de dégâts lors de la catastrophe de 2011.

Le rejet de toute responsabilité des trois ex-dirigeants de Tepco est une constante au sein du « village nucléaire » japonais, vilipendé pour son entre-soi teinté d’arrogance. Avant la catastrophe, Tepco avait été condamnée à plusieurs reprises pour des dissimulations d’incidents, dont certains critiques, survenus notamment à sa centrale Kashiwazaki-Kariwa, arrêtée après un séisme en juillet 2007. D’après un témoignage cité par l’accusation, l’arrêt de cette centrale aurait à l’époque causé des problèmes financiers à Tepco, faisant le choix de ne pas renforcer les protections de Fukushima par souci d’économie budgétaire.

Le procès, dont le verdict est attendu en mars, reste peu médiatisé au Japon, notamment, car le gouvernement du premier ministre, Shinzo Abe, pousse pour la relance du nucléaire. Huit réacteurs ont été redémarrés depuis 2011 et seize vont être démantelés sur les cinquante-quatre que comptait l’Archipel avant Fukushima.

M. Abe veut aussi faire oublier une catastrophe qui a forcé l’évacuation de près de 200 000 personnes, sinistré une région pour des décennies et qui pourrait coûter 22 600 milliards de yens (182 milliards d’euros). Des épreuves des Jeux olympiques de 2020 à Tokyo sont par ailleurs prévues dans le département de Fukushima.Lire aussi  Le Japon reconnaît pour la première fois que la mort d’un employé de Fukushima est due aux radiations

Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance)

Aluminium de Fukushima

Les torches et médailles des JO de Tokyo seront fabriquées à partir d’aluminium de Fukushima

Cérémonie d’ouverture des jeux olympiques de la jeunesse à Buenos Aires, le 6 octobre 2018. (AFP)

Le Japon a décidé de rendre un hommage à la catastrophe de Fukushima pour les Jeux olympiques d’été 2020 qu’il organise.

Par  L’Obs Publié le 02 janvier 2019 à 16h56

  • « Il est temps de passer à l’action », l’appel pour le climat de la gouverneure de Tokyo 
  • 10 choses à savoir sur la nouvelle ministre des Sports, Roxana Maracineanu 

Un beau symbole pour un événement tout aussi symbolique. L’agence de presse Kyodo News vient en effet de révéler, citant un média local, que les quelque 10.000 torches olympiques, qui seront utilisées pour porter la flamme d’Olympie à Tokyo en vue des Jeux olympiques d’été de 2020, seraient confectionnées à partir de pièces d’aluminium recyclées provenant des logements temporaires de la préfecture de Fukushima.

Les 5.000 médailles qui seront attribuées aux athlètes devraient elles aussi comporter du métal recyclé à partir d’appareils électroniques de la région de Fukushima.

Un soutien symbolique aux personnes qui ont perdu leur logement lors de la terrible catastrophe de 2011. Bien entendu, l’organisation des JO travaillera en collaboration avec la préfecture afin de déterminer quels métaux dont la région n’a plus l’utilité pourront être recyclés.

Mais il ne s’agira pas du seul hommage à la tragédie du tremblement de terre et du tsunami. En avril 2018, le comité olympique avait annoncéque le parcours de la flamme aurait pour thème « L’espoir éclaire notre chemin » (« Hope lights our way »). La flamme olympique traversera en effet trois régions touchées par le tremblement de terre de 2011 : Fukushima, Iwate et Miyagi. Elle terminera son parcours dans le New National Stadium de Tokyo le 24 juillet 2020 pour la cérémonie d’ouverture.

Tokyo-2020 est cependant confronté à des défis majeurs, en premier lieu les fortes chaleurs qui tuent chaque été au Japon plusieurs centaines de personnes.

Les organisateurs ont reconnu la semaine dernière que les mesures pour contrer le climat extrême, comme l’installation de brumisateurs mobiles ou le recouvrement des routes avec un revêtement spécial absorbant la chaleur du soleil, allaient peser sur les comptes.

Malgré tout, ont-ils assuré, la prochaine version du budget, qui doit être dévoilée plus tard dans le mois, ne dépassera pas l’enveloppe fixée précédemment à 1.350 milliards de yens (10,3 milliards d’euros).

Explosion des dépenses

Des inquiétudes étaient apparues récemment après un avertissement du Comité d’audit japonais, soulignant que les dépenses du gouvernement central dépassaient largement le montant prévu initialement. Les organisateurs avaient répondu en affirmant que de nombreux coûts mentionnés dans le rapport n’étaient en réalité pas directement liés aux Jeux.

Le chef de la commission de coordination du CIO, John Coates, a appelé à distinguer « les coûts opérationnels des Jeux et les investissements dans les infrastructures qui seront un héritage » de l’événement.

L’organisation des Jeux eux-mêmes « ne puisera pas dans les fonds publics », a-t-il insisté, sur fond de désaffection populaire de nombreuses villes à l’égard des JO.

Page 11 of 11

Fièrement propulsé par WordPress & Thème par Anders Norén