La nature reprend ses droits à Fukushima: porcs et sangliers élisent domicile dans la ville abandonnée

© Ces sangliers du Japon se sont même hybridés avec des cochons domestiques.( The Yomiuri Shimbun via AP Images ) – ISOPIX

Dix ans, après la catastrophe nucléaire, une zone de 370 km2 reste inhabitable pour les humains. Mais pas pour la faune sauvage, ni même pour d’anciens animaux domestiques. Qui finissent par se fondre avec la faune locale.

Fukushima, dix ans déjà. Dix ans depuis le premier accident nucléaire majeur du XXIe siècle, qui a contraint 160.000 Japonais résidant dans un rayon de 20 km autour de la centrale à évacuer en urgence face au danger des retombées radioactives. Beaucoup n’ont jamais pu retourner dans leur foyer : malgré la réduction progressive de la zone d’exclusion, ce sont pas moins de 370 km² de sol japonais qui restent encore inhabitables.

Inhabitables pour homo sapiens. Car dans ce décor véritablement post-apocalyptique d’autoroutes et de banlieues pavillonnaires abandonnées du jour au lendemain, la nature a repris ses droits. Et l’espèce qui semble la plus prospère depuis le départ de notre espèce, c’est le sanglier du Japon. Aussi appelé cochon à moustache blanche,ou Inoshishi en Japonais, cet animal se multiplie rapidement: le gouvernement estime que le nombre de ces animaux sauvages est passé de 49.000 à 62.000 rien qu’entre 2014 et 2018, et on ne peut que supposer qu’ils continuent à proliférer. Sans voiture pour les percuter, sans fermier pour les chasser, et sans le vacarme des humain pour les effrayer.

Échappés des fermes

S’il n’est pas étonnant de voir la faune prospérer après le départ des humains, une étude récente a découvert quelque chose d’assez inattendu avec ces sangliers. Ou plutôt dans leur patrimoine génétique: ils se sont visiblement massivement hybridés avec des cochons domestiques.

La région de Fukushima comptait de nombreuses exploitations agricoles: au départ des habitants, la plupart des animaux ont été abandonnés. Seuls chats et chien ont été ensuite secourus; les animaux de ferme ont, eux, été massivement abattus : 600.000 poulets, plus de 10.000 vaches, et environ 30.000 porcs. Mais ceux-ci se sont visiblement échappés en assez grand nombre pour survivre et… Rejoindre les populations de sangliers ! Ces derniers portent dans leurs gènes une ascendance assez forte de cochons domestiques, même si celle-ci va sans doute s’atténuer avec le temps. Et ils sont en bonne santé : l’étude n’a pas trouvé trace de séquelle de la catastrophe dans leur patrimoine génétique. Ces porcs plus ou moins hybrides sont en tout cas devenus moins nocturnes qu’avant, sans que l’on sache si c’est dû à leur ascendance, ou juste au départ du principal danger durant la journée: nous.

Cette histoire ressemble à s’y méprendre à une fable du réalisateur Hayao Miyazaki, mais elle est bien réelle. Et pas si surprenante: à Tchernobyl aussi, la zone d’exclusion est devenu un immense refuge pour les animaux sauvages, qui y prolifèrent comme si la présence humaine n’était plus qu’un mauvais souvenir. Tandis qu’un bon millier de chiens, descendants de ceux abandonnés après la catastrophe, y vivent encore en meute. Vont-ils un jour se fondre dans les populations de loups ? Qui sait ?