"Rien n'est plus proche du Vrai ... que le Faux"

Réunion de conseil et Covid

Depuis la crise sanitaire du Covid qui sévit en France depuis mars 2020, les municipalités ont beaucoup mal à gérer les réunions de conseils municipaux. 
A chacun sa solution, avec pour objectif dans la majorité des cas, le respect de la démocratie locale
Léa Guedj, journaliste sur France Inter, est allée à la rencontre des maires et nous fait part des choix de chacun, qu’elle publie dans un article  le

Conseils municipaux : comment les communes s’adaptent aux restrictions sanitaires

Pour maintenir ces délibérations entre élus et permettre aux citoyens d’y assister, des mairies passent aux visioconférences et aux retransmissions en direct sur internet. Mais la transition n’est pas toujours facile.
Pour respecter les consignes sanitaires, des conseils municipaux, comme celui de Toulouse, ce sont délocalisés dans des salles plus grandes.
Pour respecter les consignes sanitaires, des conseils municipaux, comme celui de Toulouse, ce sont délocalisés dans des salles plus grandes. © AFP / Frédéric Scheiber

Depuis mai 2020, les conseils municipaux peuvent se tenir sans la présence des administrés, ou avec un nombre limité de personnes. Les communes tentent de s’adapter pour conserver la caractère public des séances, par une retransmission en direct. Les élus peuvent également se réunir en téléconférence. Autant de modalités de fonctionnement dont disposent désormais les maires pour maintenir ce moment important de la démocratie locale, malgré la crise sanitaire. Même si certains rechignent à les adopter.

En salle, avec un nombre restreint d’élus

Des communes ont ainsi décidé de poursuivre les débats en salle, parfois en se délocalisant dans des locaux plus grands et avec ce que cela implique de mesures de distanciation, port du masque et autres plexiglass. Pour le maire socialiste de Creil, dans l’Oise, hors de question de renoncer au « cénacle de la démocratie locale », explique Jean-Claude Villemain à France Inter. Pas de visioconférence donc, mais des élus en nombre restreint, auxquels ceux qui sont absents peuvent déléguer leur pouvoir.

Du côté de l’opposition, cette décision agace. Les élus du groupe d’opposition Génération Creil ont tout simplement refusé d’assister au conseil municipal lundi dernier. « Creil est au cœur d’une zone de forte propagation de l’épidémie, justifie Johann Lucas, le président du groupe, et il y a eu des cas de covid parmi les agents, cadres et élus de la commune. » « J’applique la loi », rétorque l’édile, faisant référence à l’ordonnance du 1er avril 2020 qui prévoit que le tiers des membres doivent être présents ou représentés par des élus porteurs de pouvoirs.

Les séances en visioconférence, c’est toute une organisation

Avec plus ou moins d’entrain, des municipalités ont sauté le pas. Philippe Laurent, maire (UDI) de Sceaux, organise les conseils municipaux en visioconférence, via le logiciel StarLeaf, depuis décembre 2020. « C’est beaucoup plus long et pénible, car les élus sont installés chez eux tranquillement, alors ils parlent, parlent…, soupire l’élu. _Une des séances a même duré onze heures, jusqu’à six heures du matin !_«  C’était la séance du 17 décembre 2020, visible sur Youtube, s’il vous prend l’irrépressible envie de la visionner.

 

À Montreuil, en Seine-Saint-Denis, le service de communication concède également que l’organisation est « plus compliquée ». Il y a « tout un nouveau protocole à adopter et des problèmes techniques à résoudre ». La Ville a donc rédigé une note explicative des règles à suivre pendant ces réunions à distance. Les modalités de prise de parole, d’abord. Les conseillers doivent appuyer sur l’option « lever la main » dans Zoom. Ils s’expriment à tour de rôle « après avoir été préalablement autorisés à prendre la parole par le maire » qui active leur micro. 

 

Il a aussi fallu résoudre la problématique du vote en ligne. À Montreuil, « le maire ouvre le vote via une solution de vote à distance sécurisée pour laquelle les élus auront reçu un identifiant de séance par mail et un mot de passe personnel par SMS ». Le logiciel qu’ils utilisent s’appelle Quizzbox, le même que celui choisi par Malakoff, Nancy, Vaulx-en-Velin ou Saint-Nazaire par exemple.

À Château-Thierry, dans l’Aisne, le vote se fait de manière plus traditionnelle. Devant son écran, le maire Radical, Sébastien Eugène, demande lui-même s’il y a des oppositions ou des abstentions. « Des personnes se signalent en levant la main, physiquement ou virtuellement », précise l’édile qui « demande systématiquement leur vote aux membres de l’opposition ».

Le vote dématérialisé présente un inconvénient : impossible de réaliser des votes à bulletin secret. « On est obligés de reporter ces votes là ou de les faire en présentiel », indique Sébastien Eugène. C’est d’ailleurs l’une des raisons évoquées par certains maires pour refuser les conseils en visio.

Des réunions suivies « en live »

Malgré ces difficultés techniques, le maire apprécie le distanciel, car « les conseillers s’écoutent plus entre eux, on ne peut pas couper la parole, alors que c’est assez fréquent en salle ». La retransmission en Facebook Live est aussi devenue systématique. Une « alternative » pour ouvrir le conseil « à un plus large public ». « Généralement cinq à dix personnes viennent au conseil municipal, toujours les mêmes, souvent d’un certain âge », observe-t-il. Tandis qu’« une centaine d’internautes regardent en direct », et certaines vidéos, qui durent environ quatre heures, cumulent jusqu’à 5 200 vues au total.

 

Le direct, implique aussi « plus d’interactivité » avec les administrés. Sous cette vidéo du 12 novembre 2020, on trouve plus de 100 commentaires. Sébastien Eugène, a fait le choix de permettre aux habitants de commenter la séance : « S’ils sont constructifs, il nous arrive même d’y répondre en direct. »

Des centaines de communes ont décidé de diffuser leurs conseils municipaux en direct pendant la crise sanitaire. Villeurbanne, Mulhouse, Massy, Caen, Bergerac, Brest… Pour ces villes, la captation vidéo est une nouveauté. Et cela nécessite une certaine logistique et un investissement financier. Au début, « on a bidouillé pour retransmettre sur les réseaux, en utilisant un téléphone portable », raconte Béatrice de François, maire (PS) de Parempuyre, en Gironde.

Très vite, la maire s’aperçoit que la qualité de l’image et du son n’est pas suffisante. Alors, « on a investi dans une caméra sur pivot », décrit l’élue, dont les conseils sont visibles sur YouTube. La commune a aussi fait appel à un prestataire, et « ça a un coût non négligeable : 800 euros », précise-t-elle.

La diffusion sur les réseaux sociaux booste les conseils municipaux

Limoges fait partie des villes qui ont davantage d’expérience et de moyens pour investir dans la retransmission vidéo. La municipalité diffuse les séances sur le site de la ville depuis 2014, dans un objectif de « transparence ». Pour cela, elle fait appel à au prestataire Multicam Systems, pour un montant de 2 880 à 3 600 euros par séance.

Depuis juillet 2020, les réunions sont aussi retransmises sur Facebook Live, puisqu’il n’y a plus de public en salle. « On a changé d’échelle, on touche beaucoup plus de monde, constate Sandrine Javelaud, directrice de la communication de la Ville : sur le site de la ville, on avait en moyenne 600 personnes qui regardaient en direct, et 300 en replay. » Sur Facebook, les vidéos cumulent entre 6 000 et 13 000 visionnages.

 

Les internautes participent activement. « On a un « community manager » qui modère les commentaires, explique la directrice de communication, il répond aux questions lorsqu’elles portent sur des dossiers précis. Parfois, il faut enlever certains commentaires haineux. » Même si les discussions sont « assez techniques » et le direct « incite à une certaine tenue de la part des conseilleurs municipaux », précise Sandrine Javelaud, l’un des internautes écrit en commentaire : « On se croirait au théâtre ».

Les commentaires des internautes « difficiles à modérer »

Le « théâtre », justement, c’est ce que veut éviter Jean-Claude Villemain, le maire (PS) de Creil. Ce qui apparait comme « un outil qui fait vivre la démocratie » aux yeux de certains élus, lui semble au contraire relever de la « politique spectacle ». Les conseils de la Ville de Creil sont diffusés en direct, mais uniquement en audio, sans image, sur YouTube. Les commentaires sont désactivés, comme sur la plupart des vidéos de conseils municipaux sur la plateforme. Une option que ne permet pas le Facebook Live.

Pour le maire de Creil, l’absence de commentaires des internautes ne change pas grand-chose, puisque, lors d’un conseil municipal habituel, « le public ne peut pas intervenir comme il veut. Il faut qu’il demande la parole et que le maire suspende la séance. » Un avis que partage la mairie de Bussy-Saint-Georges. La ville de Seine-et-Marne a d’abord tenté de diffuser son conseil municipal en Facebook Live, le 10 décembre 2020.

 

Résultat : 180 commentaires, dont quelques-uns reçoivent une réponse de la Ville de Bussy. Mais face à « des débordements » et « des commentaires parfois violents » qui sont « difficiles à modérer », la municipalité choisit de ne diffuser les directs que sur Youtube, sans possibilité de commenter.

Des maires refusent le distanciel et les retransmissions en direct 

Il y a des majorités qui refusent tout bonnement la retransmission en direct, en audio ou en vidéo. C’est le cas à Boulogne-Billancourt, au grand dam de Pauline Rapilly-Ferniot, élue de l’opposition (EELV). Elle n’a pas pu se rendre au dernier conseil, parce qu’elle était cas contact, et « on m’a refusé d’y assister en visio », relate-t-elle. Ce qu’elle regrette encore davantage, c’est l’absence de diffusion des séances en ligne. « On a proposé un vœu en ce sens, mais la majorité a voté contre », assure-t-elle.

Dans Le Parisien, Pierre-Christophe Baguet, le maire (LR) de Boulogne-Billancourt justifie sa décision par l’attitude de l’opposition « qui, dès le premier conseil municipal, fait un peu ce qu’elle veut, des gens se lèvent pour filmer leurs camarades ». Il prend pour exemple une vidéofilmée pendant le conseil municipal diffusée sur les réseaux sociaux en février. On y voit Pauline Rapilly-Ferniot qui tente de dénoncer des propos sexistes dont elle a été victime par des élus de la majorité. Le maire coupe alors son micro.

 

Le maire (PS) du Mans, Stéphane Le Foll, fait aussi partie des réfractaires. À Ouest France, il déclare que « filmer un conseil municipal, ça coûte » et que « si c’est faire de la transparence pour faire de la critique systématique, ce n’est pas la peine ». Marie James, candidate de gauche aux municipales 2020, fulmine. Elle a même lancé une pétition pour « généraliser la diffusion vidéo publique des conseils municipaux et communautaires ».

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